Moteur 6 temps Porsche : une révolution qui pourrait sauver le thermique
Porsche parie sur un brevet de moteur 6 temps qui promet jusqu'à 50 % de rendement supplémentaire en déclenchant deux combustions par cycle et en recyclant la chaleur résiduelle.

Brevet déposé fin 2025 par Porsche
Deux combustions dans un cycle de six temps
Porsche revisite le moteur à combustion en ajoutant deux temps supplémentaires au cycle classique. Plutôt que de relà¢cher immédiatement les gaz d'échappement, le constructeur les conserve pour effectuer une seconde explosion. Concrètement, chaque cycle complet n'active plus une combustion tous les quatre tours de vilebrequin mais un allumage tous les trois tours, avec un surplus d'énergie à la clé.
La première séquence reste familière : admission, compression, explosion et détente. Dans la cinquième phase, les gaz brûlés demeurent emprisonnés dans le cylindre. Une nouvelle admission d'air frais et de carburant intervient alors, permettant une recompression qui déclenche une seconde combustion. Ce double allumage vise un gain de rendement estimé entre 30 % et 50 % tout en débarrassant le moteur des limites du cycle classique.
Transformer les pertes thermiques en travail mécanique
Récupérer la chaleur résiduelle
Les gaz d'échappement d'un moteur conventionnel partent souvent à plus de 700 °C, soit autant d'énergie perdue. Avec son six temps, Porsche capture cette chaleur pour alimenter la seconde combustion. La température moyenne du cycle grimpe, ce qui augmente le taux de compression effectif et rapproche le rendement théorique du principe de Carnot.
Le constructeur prévoit aussi un vilebrequin modifié avec bielles à géométrie variable. Le piston descend plus bas afin d'aspirer de l'air via des lumières latérales avant de remonter pour recomprimer le mélange. L'objectif est de synchroniser la dynamique des gaz sans pénaliser le couple à bas régime, un exercice délicat pour un bloc destiné aux sportives.
Embiellage à pignons planétaires et contraintes d'entretien
Une complexité mécanique à maà®triser
Introduire un embiellage planétaire ajoute des engrenages, axes et articulations supplémentaires. Cette architecture promet un contrôle précis du mouvement des pistons mais renforce les risques de jeux mécaniques, de friction et d'encrassement. Les gaz retenus dans le cylindre peuvent charrier des particules et provoquer des dépôts, un scénario proche des problèmes connus sur les vannes EGR.
Porsche devra aussi valider la tenue de ce bloc à haut régime. Les 911 et Cayman vivent au-dessus de 7 000 tr/min et toute inertie parasite pourrait ruiner le gain théorique. Enfin, le système devra passer les normes anti-pollution les plus strictes, ce qui suppose une gestion fine de l'injection et des post-traitements d'échappement.
De Bruce Crower aux inventeurs des années 1920
Une idée déjà testée mais jamais industrialisée
Le moteur six temps n'est pas une idée neuve. En 2004, l'ingénieur américain Bruce Crower proposait déjà un prototype utilisant de la vapeur injectée après la combustion pour récupérer de l'énergie. Avant lui, plusieurs brevets publiés dans les années 1920 à 1960 imaginaient des cycles hybrides sans jamais franchir l'étape de la série à cause des coûts et de la fiabilité.
La différence aujourd'hui vient des moyens de Porsche et de la perspective des carburants synthétiques. En combinant e-fuels et rendement supérieur, le constructeur peut promettre un moteur quasi décarboné à l'échelle du cycle de vie, tout en conservant la sonorité et le ressenti qui font le succès de ses modèles sportifs.
Une stratégie parallèle aux investissements dans l'électrification
Prolonger l'ère du thermique face aux électriques
Ce brevet confirme que Porsche ne tourne pas définitivement la page du thermique. Tandis que la marque investit dans les plateformes 100 % électriques et les batteries solides, elle entretient une voie alternative pour ses clients attachés aux moteurs à pistons. Si les e-fuels se démocratisent, un six temps à haut rendement pourrait offrir une solution bas carbone réaliste sans dépendance totale au réseau de recharge.
Reste à savoir si cette innovation quittera les bureaux d'études. La mise en production imposera des lignes d'assemblage spécifiques et des coûts élevés, un pari risqué dans un contexte réglementaire mouvant. Les prochains prototypes donneront la mesure du potentiel réel de ce moteur à six temps siglé Porsche.




